Origines du village

Préhistoire

Le bulletin d’Histoire et d’Archéologie du Périgord édité dans les années 1870 décrivait le canton d’Issigeac comme étant l’un des plus intéressants du point de vue préhistorique. De nombreux dolmens étaient présents dans les environs d’Issigeac. Beaucoup ont disparu, servant parfois à construire des bâtiments.

Les romains en issigeacois

Pierre Cadalen, en 1948, fait référence à de multiples vestiges romains trouvés en issigeacois aux XVIII°, XIX° et début du XX° siècle et conclut : « Que les romains aient habité le canton d’Issigeac, la chose apparaît comme certaine. Mais, sans doute qu’en arrivant, ces conquérants durent déjà trouver le pays habité. Les Petru corü habitaient, outre leur cité de Vesunna, de nombreux oppida (villages fortifiés) et des fermes isolées. La colonisation romaine dut multiplier ces dernières. Favorable à la vie tranquille, le site d’Issigeac invitait de lui-même, en leur offrant les plaisirs de la chasse et la facilité des travaux agricoles, les riches gallo-romains à égrener leurs opulentes villas le long de la voie romaine. » (rééd. 2006, p. 23)

La voie romaine (Vesonne) reliant Périgueux à Agen, via le site d’Eysses (Exidium, Villeneuve/Lot) passait par Issigeac : une Pierre milliaire près de Monmarvès, attribuée à César, laisse supposer que cette voie fut bornée vers 56 avant J.C. par les renforts de Publius Crassus, envoyé par César pour soumettre l’Aquitaine. L’armée de Publius Crassus était composée de 12 cohortes et de cavaliers (ces derniers étant principalement gaulois). Ayant traversé la Dordogne à Lalinde, elle se dirigeait vers Sos (en Lot-et-Garonne) pour y mener son ultime bataille mais a dû s’arrêter pour attendre des renforts. Issigeac était alors au carrefour des routes de Périgueux, Agen et Marmande. C’était l’endroit idéal pour attendre les troupes  venues de Narbonne et Toulouse.

Une structure de camp romain

Le site d’Issigeac est située sur une petite colline dans le vallon creusé par la Banège, un petit ruisseau affluent du Dropt. Sa surface correspond à l’espace nécessaire pour dresser un campement pouvant recevoir l’armée romaine de Publius Crassus. Sa forme fait écho aux structures défensives utilisées par César (notamment à Alesia) : une barrière de pieux, séparée d’un fossé par un terrain d’environ 30m pour se tenir à bonne distance des flèches des archers. On peut ainsi très facilement observer cet espace sur le tour de ville entre la route et le mur d’enceinte. Le bief alimentant un moulin à l’ouest cerne quant à lui une bonne moitié du village par l’est et le nord (la partie nord-est est malheureusement couverte depuis les années 1930). Les empreintes d’écoulement d’eau pluviale à l’ouest (place Mercadil) marquent l’emplacement de l’ancien fossé dont une partie est couverte sous la route du tour de ville construite à la fin du XIX° siècle au niveau de la Prévôté.

Un site idéal pour un camp

La création d’une enceinte défensive sur cette petite colline était facilitée par la création d’un fossé alimenté à l’est par la Banège et au sud par une vaste zone humide ; les deux réseaux se rejoignants au nord-ouest. Les nombreuses résurgences sur cette parcelle assuraient une alimentation en eau potable. Les bois environnants garantissaient la discrétion et permettaient la chasse. Les points hauts avoisinants permettaient une surveillance des alentours. La toponymie actuelle témoigne de cette structure défensive au travers des noms des villages autour d’Issigeac : Montaut, Monmadalès, Monsaguel, Monmarvès… tous perchés sur un point haut.

Émergence de l’opidum

À la levée du camp, la colline présentait la structure idéale pour l’implantation d’une villa gallo-romaine : les multiples sources ont permis d’installer des termes dans la partie nord-est du site tandis que le reste de la colline offrait un espace vert clos typique, favorable à la culture.

Fin de la période romaine

La victoire de Clovis à Tolbiac (495) marque la fin de la période romaine. Devenu chrétien, il traverse notamment le Périgord. L’Abbé Cadalen affirme « C’est ainsi que serait né le monastère de Sediacum (508), origine du bourg à coutumes […] et de la charmante petite ville que nous pouvons admirer aujourd’hui. » (p. 24)

Conclusion

Si l’Abbé Cadalen ne se prononce pas sur l’existence ou non d’un site gaulois à Issigeac, il laisse entendre que l’armée romaine y a trouvé un endroit où établir un camp. Sediacum, nom originel d’Issigeac pourrait ainsi faire référence au mot Sediare (siège). La structure du village tend à confirmer cette hypothèse, ce qui permet d’évaluer la fondation du camp romain en 56 avant J.C., année où Publius Crassus a “pacifié” la Gaule. Ce campement romain donnera naissance à un riche opidum gallo-romain dont l’apogée se situe entre le III° et le IV° siècle, comme en témoignent les découvertes archéologiques de 1992, ce que Pierre Cadalen ignorait lors de l’écriture de sa thèse en 1948.

Source :

Abbé Pierre Cadalen, Issigeac et ses coutumes [1948], rééd. Nîmes, Lacour, 2006.